« Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde. » La citation apocryphe que l’on attribue volontiers à Albert Camus pourrait (en grande partie) illustrer le sujet abordé ici. Pour cause, si la célèbre phrase souligne le caractère performatif du langage, elle lève par dessus tout le voile sur le filtre déformant que peut revêtir celui-ci quant à notre perception du réel. 

Justement, à travers la grande marche organisée par #NousToutes le 23 novembre 2019, nous avons décidé de regarder droit dans les yeux et sans détour une parcelle particulièrement problématique- pour ne pas dire tragique- de ce réel. Un mal durablement ancré dans les tréfonds de notre société et dont le nom a longtemps été tu : les féminicides.

 

Un constat glaçant

 

Plus de cent femmes ont été tuées par leur compagnon ou ex-compagnon en France depuis le début de l’année 2019. Voici la morbide statistique qui a polarisé l’attention de l’opinion publique à l’occasion du Grenelle des violences conjugales qui s’achèvera le 25 novembre 2019. Un état de fait particulièrement alarmant et éclairant quant à l’immensité de la problématique en question.

 

Ainsi,  une femme décède sous les coups de son partenaire ou de son ex-partenaire tous les trois jours. Nous voilà donc confronté à une réalité difficilement contestable : les féminicides conjugaux sont un fait criminel à part entière. 

Pour autant qu’en est-il de la perception de cet état de fait ? Quel regard pose la société sur ces crimes ? Appréhendons et « verbalisons » nous de la bonne manière notre improbation ?

C’est là que le bât blesse. Dans les faits, la reconnaissance en tant que tel du féminicide peinerait à faire totalement l’unanimité en France. Pays des lettres par excellence, nous aurions pourtant du mal à “nommer” et qualifier sans tabou ce type de meurtre de sorte à agir en conséquence. Il faut dire que ces derniers mois ont donné lieu à tous genres de débats au cours desquels les uns et les autres ont pu exprimer des sensibilités mitigées- voire carrément hostiles- quant à la qualification de ce crime. (cf: Aujourd’hui les meurtres conjugaux commis sur les femmes sont considérés comme des homicides par la loi française.).

C’est sur la base de ce constat mortuaire mais plus globalement sur l’ensemble des violences faites aux femmes qu’a accouché la marche du 23 novembre organisé par #NousToutes !

 

Un combat pour #NousToutes et nous tous !

 

Mais au fait, qu’est-ce que #NousToutes ?

Créée en 2018, #NousToutes lutte pour en finir avec ces violences sexistes et sexuelles. Son principal fait d’arme ? Avoir rassemblé en novembre 2018 près de 60 000 personnes partout en France, la plaçant ainsi au rang de plus grande manifestation féministe depuis 1995. Rien que ça.

Mais plus que l’écho d’un sentiment de révolte féminin, #NousToutes veut rallier l’ensemble de la société. Pour cause, si le mouvement est porté par des femmes, il aspire avant tout à mobiliser le plus grand nombre et notamment les jeunes générations indignées par ces violences. Les instigatrices du mouvement en sont d’ailleurs convaincues: “En nous y mettant toutes et tous, on peut faire reculer les violences sexistes et sexuelles !”

 

Elles espèrent ainsi que le 23 novembre, fera date et mobilisera des dizaines de milliers de personnes déterminées à marcher contre les violences sexistes et sexuelles. La finalité de cette marche ? Obtenir du gouvernement un plan national d’urgence financé à hauteur de 1 milliard d’euros.

Pour cause, les résultats de l’étude pré-citée démontrent que les efforts des pouvoirs publics pour combattre ces violences intrafamiliales inacceptables doivent plus que jamais se maintenir et s’accentuer. Bref, bien plus qu’une manifestation de colère face à des violences criminelles, la marche du 23 novembre porte l’ambition d’impulser de significatives évolutions, tant sur le plan des mentalités que sur le plan législatif. Éclairer les effluves obscurantistes de la société pour désarmer l’approximation passant sous silence les vérités que l’on ne veut voir, que l’on ne veut entendre, que l’on ne veut “nommer”.

Pour mener à bien cette grande mobilisation, #NousToutes a lancé une cagnotte Leetchi ! Les dons collectés permettront notamment d’acheminer des cars et covoiturages venus de toute la France pour qu’aucune femme ne soit empêchée de participer pour des raisons financières. Cette collecte permettra également d’assurer les gardes d’enfants pour permettre aux parents isolés ou aux parents précaires de venir marcher. En addition à ces dépenses, la cagnotte pourra financer des campagnes de sensibilisation contre les violences sexistes et sexuelles (vidéos, visuels) et à participer à leur diffusion sur les réseaux sociaux. L’objectif ? Toucher un maximum d’individus afin que plus personne n’ignore l’ampleur des violences, leurs conséquences et les outils pour les faire disparaître.

Tous les dons seront utiles et chaque euro fera une différence. Elles et ils comptent sur vous. Pour contribuer à la cagnotte tout se passe ici ! 👉 https://www.leetchi.com/c/noustoutes